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Mon Mulhouse2
8 février 2008

Les RG s’inquiètent du renouveau de l'extrême gauche "autonome"

Les RG s’inquiètent du renouveau de l'extrême gauche "autonome"
                          

 

On l’avait remarqué depuis les manifestations qui avaient immédiatement suivi l’entrée en fonction de Nicolas Sarkozy: il existe en France un renouveau de la mouvance "autonome" d’extrême gauche, qui avait aussi fait parler d’elle lors des mobilisations contre le CPE en 2006 et contre la loi LRU, en 2007.

Les Renseignements généraux, qui ont travaillé sur ces groupes, ont interpellé ces derniers mois, à Toulouse, à Bourges, en Bretagne et en région parisienne, plusieurs jeunes d’une vingtaine d’années, dont certains en possession d’explosifs artisanaux, et qualifiés un peu rapidement par les enquêteurs "d’anarcho-autonomes".

Faut-il réellement ranger, comme de nombreux médias l’on fait en reprenant intégralement et sans recul des informations policières, cette "nouvelle autonomie" parmi les dangers terroristes? C’est aller un peu vite. Car, si dans une interview au Figaro du 1er février, la ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot- Marie, met en garde contre la "résurgence violente de l'extrême gauche radicale" en invoquant le danger de voir resurgir des clônes d’ "Action directe, des Brigades rouges ou de la Fraction armée rouge", la situation est bien différente de celle de la fin des années 70, qui voyait s’écraser la queue de comète du mouvement maoïste.

Effectivement, on a vu émerger ces dernières années une mouvance de quelques centaines de militants radicaux, partisans de l’action violente dirigée contre les symboles de l’appareil d’Etat (police et gendarmerie ; bâtiments officiels). De quels textes théoriques s’inspirent-ils? A quelle mouvance idéologique les rattacher? L’enquête policière a mis en avant un texte, "L’Insurrection qui vient", publié par un "Comité invisible".

Cela peut faire peur, sauf que, loin d’être un brûlot clandestin, il s’agit…d’un livre publié en 2007 aux éditions la Fabrique, le comité invisible étant, pour éclairer la référence historique, un organisme lyonnais de propagande républicaine, dans les années 1830. Egalement mis en avant, le fait que certains interpellés ont été trouvés en possession de documents signés "Organe de liaison au sein du parti imaginaire", lequel "parti imaginaire" a préfacé, toujours aux éditions la Fabrique, un livre titré "Maintenant, il faut des armes". Certes, mais l’ouvrage en question est l’œuvre... d'Auguste Blanqui!

Les déçus des mouvements antifascistes et altermondialistes

Rien de bien neuf donc. La seule réelle continuité avec l’autonomie des années 80 réside dans la présence, pour encadrer et former des militants souvent arrivés sans aucune culture théorique d’extrême gauche, d’une ou deux dizaines de militants "historiques" qui ont commencé à s’engager voici un quart de siècle.

L’irruption de la mouvance autonome n’est pas, contrairement à ce qu’affirme la ministre de l’Intérieur, le résultat de "l’affaiblissement à droite comme à gauche des partis politiques qui permettent d’exprimer les frustrations sociales". Elle est le résultat de la crise du mouvement antifasciste, elle-même consécutive à la marginalisation du Front national. Elle est surtout la conséquence de l’institutionnalisation de l’extrême gauche altermondialiste, désormais intégrée au jeu politique et électoral et qui génère donc des déçus.

D’où l’émergence d’une vague de très jeunes militants, partisans de la "propagande par les faits", et qui sont en rupture avec les organisations anarchistes constituées, telle Alternative libertaire et la CNT.

L'occupation-saccage de la Maison des sciences de l'homme

La première apparition visible des "nouveaux autonomes" date de l’occupation-saccage de la Maison des sciences de l’homme, à Paris, en mars 2006: outre des slogans violents graffités sur les murs ("CRS blessé, achève-le"), on avait alors remarqué la présence, comme dans plusieurs squatts politisés de Paris et de la banlieue, de militants allemands ou italiens d’ultra-gauche.

Les occupants de l’Ehess, regroupés sous le vocable "AG en lutte", ont d’ailleurs produit une longue brochure expliquant leur démarche, sous le titre "Une expérience d’assemblée en France au printemps 2006". A la même époque, le 23 mars 2006 place de la Nation, les "autonomes" ont également durement affronté les CRS, en fin de manifestation contre le CPE.

Mais alors déjà, le renouveau de l’autonomie violente était perceptible notamment à travers l’action des "Black Blocks" lors des sommets du G8 à Evian, à Gênes et l’année dernière en Allemagne. Et là encore, les Black Blocks sont idéologiquement hétérogènes: si l’autonomie domine dans les BB français, en Suisse, l’impulsion vient des marxistes-léninistes du Revolutionäre Aufbau.

L’autonomie est donc une nébuleuse éclatée. Elle se construit sur la base de petits groupes locaux et de petites publications irrégulières dont beaucoup sont visibles sur le site Infokiosques.net. Internet d’ailleurs, devient un vecteur important de circulation d’informations de la mouvance, en particulier sur le site Indymedia Paris, où sont postés nombre de messages avertissant d’une mobilisation ou d’un rassemblement, pratiquement en temps réel.

Des textes aux relents d'extrême droite

Il est une dernière question qu’on peut de poser, à la lecture de certains textes de cette mouvance: anarchiste, l’est-elle vraiment? Certains passages en effet, ont des réminiscences curieuses. L’utilisation du concept d’Occident par l’AG en lutte, par exemple, pour décrire l’Europe et l’Amérique, n’a pas grand-chose de libertaire. Et pour conclure, lisons les phrases suivantes:

"Qui grandit encore là où il est né? Qui habite là où il a grandi? Qui travaille là où il habite? Qui vit là où vivaient ses ancêtres? Et de qui sont-ils, les enfants de cette époque, de la télé ou de leurs parents?

"La vérité, c'est que nous avons été arrachés en masse à toute appartenance, que nous ne sommes plus de nulle part, et qu'il résulte de cela, en même temps qu'une inédite disposition au tourisme, une indéniable souffrance."

C’est un extrait de "L’Insurrection qui vient" (pp.19-20). Et cela sent bigrement le "retour aux racines", voire "la terre et les morts", thèmes chers à l'écrivain d'extrême-droite Maurice Barrès.

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