Quel avenir désire Ségolène Royal ?
Quel avenir désire Ségolène Royal ?
«
Comment on sort la gauche de l'impasse ? Par un dépassement, c'est à
dire en prenant ce qu'il y a de plus utile dans chaque courant »,
expliquait, lundi soir, Ségolène Royal lors du débat, auquel elle ne
participa qu'à peine, organisé au théâtre du Rond-Point par Le Monde avec Alain Krivine, Henri Weber et Manuel Valls. Selon sa vision, il convient de prendre « ce qu'il y a de bon » dans chaque sensibilité de l'opposition. La gauche pourrait ainsi picorer « l'impartialité de l'Etat »
des centristes et de François Bayrou ou la générosité des
altermondialistes. Rien de très nouveau finalement, puisque c'était
déjà ce qu'elle avait laissé entendre pendant la campagne.
Mais six mois après le scrutin,
personne ne craint plus de gêner Royal, qui se trouve du coup soumise
au feu de la critique. Le fabiusien Claude Bartolone fustige sa volonté
d'alliance avec François Bayrou, révélée dans l'ouvrage qui sort
aujourd'hui, Ma Plus belle histoire, C'EST VOUS, et demande à Ségolène Royal de préciser « son projet, sa stratégie et sa conception de la gauche ».
Car si les ambitions de la présidente du Conseil général de
Poitou-Charentes sont connues – elle promet à ses lecteurs et à ses
électeurs des « retrouvailles », sans doute en 2012 – la façon dont
elle compte s'y prendre demeure pour l'instant très mystérieuse.
Lorsque la presse l'interroge sur ses projets, Ségolène Royal botte
systématiquement en touche, préférant l'exercice de l'auteur en
promotion à celui de la femme politique en action.
Il faut donc chercher du côté de ses
proches pour tenter d'y voir, un peu, plus clair. Selon Jean-Louis
Bianco, son ancien directeur de campagne, Désirs d'avenir a survécu à
la campagne. « Ni club, ni parti bis »,
cette structure est cencée avoir deux vocations : attirer des
sympathisants qui ne sont pas forcément membres du PS et faire
travailler ensemble quelques experts et personnalités politiques. Côté
experts, on connaît les économistes Thomas Piketty, Philippe Aghion, et
la sociologue Dominique Méda. Mais les rangs sont moins serrés que
pendant la campagne, qui a fait naître frustrations et/ou déceptions. A
titre d'exemple, Bruno Rebelle, ancien directeur de Greenpeace et
expert sur les questions environnementales, est plus attiré par des
structures moins « politiques ». Côté politiques, son ancien directeur
de cabinet Christophe Chantepy a également pris du champ, Julien Dray,
quoiqu'il en dise, et surtout Arnaud Montebourg aussi… Reste la
question : un livre, un clan, une candidate, mais pour quoi faire ?
Continuer d'exister, peut-être, en
premier lieu, malgré les tirs de barrages des courants du PS qui lui
sont opposés et souhaiteraient la voir disparaître. Face à l'alliance
des têtes de gondole strauss-kahniennes et fabiusiennes qui lui
demeurent hostiles, Ségolène Royal multiplie les rencontres pour tenter
de rallier des personnalités et de nouer les alliances qui lui auraient
été salutaires avant l'élection. Au plan des propositions, que ce soit
sur le thème du référendum européen, sur la réforme des régimes
spéciaux ou pour réclamer un « Grenelle du pouvoir d'achat »,
elle s'aligne systématiquement sur les positions de Solférino. Objectif
: montrer qu'elle « joue collectif », comme le répètent ses proches.
Mais le grand mystère demeure : quelle sera sa stratégie aux
municipales et lors du Congrès de 2008 ? Toutes les suppositions sont
permises. Tandis que certains affirment qu'elle pourrait « y aller » si
Bertrand Delanoë se lançait, lui aussi, dans la bataille, d'autres,
comme François Rebsamen ou Michel Sapin, lui conseillent plutôt
d'envoyer au front un de ses proches. Par exemple… François Rebsamen ou
Michel Sapin. En attendant, inutile de répondre à de trop nombreuses
questions. Il faut tenir. Cinq ans, si possible.
Mercredi 05 Décembre 2007 - 00:32
A. Borrel