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Mon Mulhouse2
7 février 2008

Sarkozy : trop, c'est trop !


Sarkozy : trop, c'est trop !

Avec i>Télé, la chronique de Nicolas Domenach, directeur-adjoint de la rédaction de Marianne.



Sarkozy : trop, c'est trop !

 

Après l'avoir tant léché, voici que la presse lâche Nicolas Sarkozy en rase campagne. Un lâchage net, brutal, sans plus de mesure ni de distance que l'adoration et la pâmoison d'hier. Ainsi les trois grands hebdomadaires du mercredi sonnent-ils de concert le glas de son règne après avoir si souvent carillonné la splendeur sidérante de son avènement. Voici quasi un hyper enterrement pour un hyperprésident… Certes, Le Nouvel Observateur, bien que fasciné, a pu exprimer quelques doutes sinon certaines critiques et son titre est moins surprenant - « Le président qui fait pschitt » - que celui de L'Express - « La déception » - et surtout que celui du Point, l'organe phare de la sarkozie qui relève en Une : « Ce qui cloche ». Et en bedeau, pour sonner lesdites cloches, on trouve non seulement le marianniste Jean-François Kahn, mais encore l'historien économiste ex sarkozyste de choc, Jacques Marseille qui en appelle vertement le président « à ce convertir enfin au réel » et à se résoudre à un inéluctable plan de rigueur. Plus surprenant encore, VSD dans son éditorial, reproche sans prendre de gants blancs au président ses « fréquentations infantiles des patrons du CAC 40, son inclinaison pour les joujoux des milliardaires » et lui fait grief d'être non plus «un président de la République mais un people » avant de consacrer 6 pages à son couple et 6 autres à son ex-femme et à son compagnon Richard Attias !

Mais il y a mieux ou pire encore. Dans Paris-Match, qui lui aussi fait sa Une sur le mariage « royal », on peut lire 2 pages singulièrement critiques contre le président écrites par le Shiva de la brosse à reluire, Jean-Marie Rouart qui, cette fois et pour une fois, prend son sujet à contre poil. Cet écrivain de l'Académie française tance en effet le chef de l'Etat lui rappelant que « l'exercice du pouvoir en France doit être un sacerdoce, une mission sacrée et que les Français rigoristes veulent un président missionnaire de la réforme ».

Comme on est loin des hyperboles laudatives, des applaudissements frénétiques qui accompagnaient ses moindres déplacements, ses plus infimes soupirs ou ses déclarations de matamore - « J'irai chercher moi-même Ingrid Betancourt » - comme on est loin même des rires complices, c'était hier pourtant, qui accompagnaient ses moqueries contre Laurent Joffrin qui l'interrogeait sur sa pratique monarchique de la République.

La presse s'est retournée d'un coup, d'un seul, et se montre même aujourd'hui aussi féroce qu'elle était hier laudative. Autant nous étions seuls à Marianne précédemment pour mettre en garde contre les dérives adoratives de médias fascinés ou aux ordres, autant aujourd'hui, nombre de journaux en rajoutent dans la critique tout aussi hyperbolique. Comme s'il fallait tout jeter et le reste du sarkozysme : on ne brûle que ce qu'on a adoré comme pour se faire pardonner. C'est la fameuse règle khanienne : on lèche puis on lâche puis on lynche, toujours de manière moutonnière. Il suffit que les sondages varient, et alors avec le vent tournent les plumes qui ne sont plus que grinçantes. Il est vrai qu'il y a des raisons et des bonnes aussi pour ce changement de ton et de cap. Le président en a fait trop lui aussi, c'est ce que disent, ce que râlent et ce que ragent les Français.

Sarkozy en a fait trop dans l'étalage de sa vie privée, dans l'exhibition de sa compagne hyper classe et de sa bande jet-setteuse, dans la pavane de sa jouissance si soixante-huitarde, dans son exigence de bonheur personnel alors qu'il ne tenait pas ses engagements très concrets sur le pouvoir d'achat. Les Français se sont agacés de cette égolâtrie satisfaite et pourtant impuissante, de cette manière abusive de tout gouverner à lui tout seul au mépris de toutes les traditions et du respect des équilibres institutionnels. Sa prétention à être un président qui gouverne tout et rien à la fois mais en même temps s'affiche en vacances luxueuses à Louxor, n'a pas conduit que l'opinion et la presse à se retourner contre lui. Voici Fillon désormais instrumentalisé contre le monarque républicain. Le Premier ministre effacé devient populaire parce qu'effacé, autrement dit « sérieux, digne, pas bling-bling ». Son absence de prétention publique, son défaut d'imagination, son manque d'agressivité et la dissimulation de son ambition passent désormais et à contrario pour qualités. L'ombre de Matignon prend de la consistance, de la lumière et même de la popularité. Aussi, les députés qui eux non plus ne veulent plus voir le président en image bling-bling, ces élus qui craignent de ne plus l'être lors des municipales, ceux-là s'efforcent-ils d'en faire un chef, d'en faire leur chef.

Les députés le poussent sur le sentier de la guerre contre l'Elysée, contre ses conseillers et contre son patron trop envahissant et impopulaire. A l'Assemblée nationale, on a même vu cette scène symbolique : les parlementaires de la majorité se sont tous levés pour l'applaudir lors des questions d'actualité. Il n'avait pourtant pas fait de grand discours, ce n'est pas son genre. Le chef du gouvernement s'était simplement engagé à tenir les promesses de campagne pour les seniors ! Une affirmation d'autorité. Une résolution nouvelle. Et on se lève désormais pour Fillon… On comprend que Sarkozy se soit énervé hier à l'Elysée et qu'il ait rappelé à l'ordre « assis » sinon « couché » la majorité, les parlementaires, les ministres et surtout le Premier ministre qui ferait mieux de défendre sa politique plutôt que de commenter sa vie privée. « Mais si le chef d'Etat n'en parlait pas lui-même de sa vie privée, ce serait plus facile », commente… un ministre !


Jeudi 07 Février 2008 - 11:41

Nicolas Domenach

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