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Mon Mulhouse2
6 février 2008

Prisons pour mineurs: série noire et polémique


Prisons pour mineurs: série noire et polémique
                                   

      

Suicide d'un détenu à Lyon, évasions à Marseille, bronca des éducateurs à Nantes: les centres créés par Rachida Dati font débat.

La prison pour mineurs de Meyzieu (Robert Pratta/Reuters).

Samedi, un détenu de 16 ans incarcéré depuis le 17 décembre, s'est suicidé à la prison pour mineurs de Meyzieu (Rhône). Il se serait pendu dans sa cellule à une bouche d'aération. C'est le premier suicide d'un jeune dans l'un des Etablissements pénitentaires pour mineurs (EPM), lancés en juin 2007 par Rachida Dati.

Mauvaise nouvelle pour l'administration pénitentiaire: ce décès s'est doublé, en moins de quarante-huit heures, de deux évasions réussies à l'EPM de Marseille.

C'est dans ce contexte que le cinquième établissement du genre ouvrait ses portes ce mardi matin, en Loire-Atlantique. Mais depuis quelques jours, l'inauguration de la prison pour mineurs d'Orvault, près de Nantes, fait des vagues. Une pétition a commencé à circuler fin janvier, intitulée "La place des enfants n'est pas en prison, Nous ne travaillerons pas en EPM!". Signé par près de 150 éducateurs, dont beaucoup sont originaires des Pays-de-Loire, ce manifeste dénonce la détention pour les moins de 18 ans, une sanction jugée "criminogène".

Coordinateur de la mobilisation et lui-même conseiller d'éducation dans le secondaire, Philippe Dubacq explique que l'opération a pour but de "refuser publiquement la logique de l'enfermement, et créer un débat dans les professions concernées par ce thème". Pour l'instant, le personnel du nouvel EPM a été recruté sur la base du volontariat.

Inauguré la semaine dernière, l'établissement d'Orvault devait accueillir ce mardi ses premiers jeunes. Cinquième du genre depuis la création des EPM en juin 2007, la structure est destinée à un maximum de soixante mineurs entre 13 et 18 ans. Du côté du gouvernement, on valorise depuis leur lancement la dimension éducative de ces prisons ciblées. Sachant qu'au 1er juin 2007, le ministère avançait le chiffre de 784 mineurs détenus en France. C'est-à-dire 1,2% de la population carcérale.

Fracture entre deux générations d'éducateurs

Signataire de la pétition des Pays-de-Loire, Claude Théodore travaille à la PJJ (la protection judiciaire de la jeunesse) depuis 1979. Syndicaliste SNPES-FSU dans les Hautes-Pyrénées, elle s'était déjà opposée à l'ouverture des deux premiers EPM, en juin 2007. Dont celui de Meyzieu, près de Lyon, où le jeune de 16 ans a été retrouvé mort le week-end dernier.

Claude Théodore dénonce la fracture apparue au sein de sa profession avec cette nouvelle génération d'établissements. Pour cette syndicaliste, qui dit avoir "très peu de retours sur ce qui se passe vraiment dans les EPM", les éducateurs sont en effet en train de se déchirer entre, d'un côté, ceux qui acceptent d'aller travailler en EPM et ceux qui s'y refusent, à l'instar des pétitionnaires de Loire-Atlantique:

"A la sortie de la formation, on fait miroiter aux éducateurs fraîchement diplômés des postes à pourvoir et des primes. Ils trouvent du travail car notre génération refuse d'y aller. Mais l'histoire ne va pas dans le bon sens: quand j'ai démarré ma carrière, en 1979, nous militions précisément pour la fermeture des grosses structures d'éducation surveillée, où l'on enfermait les mineurs.

"On revient en arrière, et, à force de faire du "tout pénal", il commence à y avoir une confusion dans la tête des jeunes entre ce qu'est un éducateur et ce qu'est un surveillant de prison."

"Ce n'est pas en occupant un jeune non stop qu'on va le faire réfléchir"

Pour Claude Théodore, qui doute qu'on puisse vraiment "faire de l'éducatif en prison", le nouveau dispositif peut même se révéler contre-productif. Elle qui travaille en milieu ouvert à Tarbes a déjà suivi, ces derniers mois, dans le cadre de son service, "deux ou trois jeunes" à leur sortie de l'EPM de Lavaur;

"Franchement, quand on les écoute, on se demande parfois si ce n'est pas mieux que la colonie de vacances! Ce n'est pas en occupant un jeune non stop, du lever au coucher, qu'on va le faire réfléchir sur son acte. Il faut un temps de pause pour qu'il puisse prendre conscience."

Cette critique d'une vie collective permanente, y compris pendant les repas, prend à rebrousse-poil le discours du gouvernement, qui vante des jeunes pris en charge "quatorze heures par jour". Pour Claude Théodore, l'EPM de Meyzieu, dans le Rhône, était devenu "une vraie cocotte-minute". Dès les premiers mois, les éducateurs dénonçaient une "suractivité" et les "journées interminables" pour les jeunes détenus.

Comme d'autres, la syndicaliste de la PJJ de Tarbes souligne par ailleurs que la mixité de ces établissements peut poser problème. A l'inauguration des premiers centres, en juin 2007, le ministère de la Justice avait fait savoir que "quatre à six places" seraient réservées aux filles dans chaque établissement.

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