Référendum sur le traité de Lisbonne : le jour le plus «non»?
Référendum sur le traité de Lisbonne : le jour le plus «non»?
L'aile du Midi à Versailles, où se réunira le Congrès le 4 févirer. © A. Doyen pour Marianne2.fr
L'agenda de ce mardi 15 janvier pèse lourd sur les épaules de Jean-Marc
Ayrault. Car, sans le vouloir, le président du groupe PS a donné un
second souffle à la contestation interne au PS pour un référendum sur
le traité de Lisbonne. Rappelons qu'à l'occasion de ses vœux, le
député-maire de Nantes avait annoncé, avant même que le sujet n'ait été
tranché en Conseil national, que les députés PS boycotteraient le
Congrès du 4 février, dernière étape avant la ratification du texte
européen. Aux protestations du Comité national pour un référendum et du
groupe parlementaire Gauche démocrate et républicaine (communistes,
écologistes et radicaux) se sont associés celle d'Henri Emmanuelli et
de Laurent Fabius, mettant en garde dans l'émission Ripostes de France
5, contre un processus « anti-démocratique ».
Effet de calendrier mais aussi
stratégie politique, la journée du 15 janvier, début de l'examen du
texte qui sera soumis au Sénat avant d'être débattu en congrès, sera
forte en débats dans la gauche.
Une signe fort de la fin de l'ère July.
5 h 00 : sortie en kiosque du quotidien Libération
On se souvient que, sous le règne de Sege July, la ligne éditoriale de
Libération avait heurté beaucoup d'électeurs nonistes de gauche. Avec
sa manchette de mardi 15 janvier sur « Le débat interdit », le quotidien désormais dirigé par Laurent Joffrin confirme son nouveau cours : aucune conversion au « nonisme »,
mais une vigilance démocratique vis-à-vis des modalités d'adoption du
Traité. Le quotidien s'interroge sur les raisons pour lesquels une
grande partie des élites refuse de lancer le débat sur le sujet.
Libération publie une interview d'Henri Emmanuelli. Dans son éditorial,
Laurent Joffrin se prononce pour un référendum quitte à voter oui si
l'on est un européen convaincu.
9 h 30 : ouverture de la première séance de l'Assemblée nationale
Le groupe GDR, notamment les communistes, présente une proposition de loi constitutionnelle visant à entériner l'adoption par référendum du traité de Lisbonne.
Bien que son adoption soit mathématiquement impossible (la gauche étant
loin de la majorité simple dans l'hémicycle), ce débat sera l'occasion
de vérifier si la seule consigne adoptée de concert lors du Conseil
national par le PS la semaine dernière (à savoir voter en faveur de
cette loi) sera suivie. Même si ça ne mange pas de pain de voter pour
une proposition qui ne peut pas être adoptée, ce « geste » pourrait au
moins redonner un semblant de crédibilité aux déclarations des
instances du parti. L'adresse aux socialistes semble d'ailleurs être au
programme de la défense de ce texte. La proposition sera présenté par
Patrick Braouezec et l'explication de vote sera réalisée par
Jean-Claude Sandrier.
Le CNR a réuni les signatures de 109 parlementaires dont 66 députés.
10 h 30 : conférence de presse du Comité national pour un référendum
Créé à l'initiative de parlementaires ayant mené bataille pour le « non
» au référendum de 2005 sur le traité constitutionnel (Jean-Luc
Mélenchon, Marie-Noëlle Lienemann et Paul Quilès), le « CNR » compte aujourd'hui parmi ses signataires de nombreux anciens partisans du « oui ». On peut également remarquer la venue à cette initiative de certaines personnalités historiquement « légitimistes »
vis-à-vis des instances du PS, comme Serge Janquin, député et président
de la fédération du Pas-de-Calais, la plus importante de France, ou
Jean-Pierre Kucheida, maire de Liévin, la plus importante section
socialiste au niveau national.
La stratégie du CNR est de ce point de
vue simple : accentuer la pression sur les socialistes et relever les
contradictions de la direction, notamment le fait que la « consigne
d'abstention » n'a pas été débattue au sein du groupe. Paul Quilès, qui
interviendra durant la conférence, compte dénoncer en particulier la
logique de « perdant » en vogue au PS : «
L'un des arguments les plus fréquents pour justifier le fait d'accepter
l'adoption par voie parlementaire, c'est de dire « Sarkozy a gagné, pas
nous », se scandalise-t-il. La seule conséquence de cette posture, c'est de renforcer le pouvoir personnel du chef de l'Etat ! » En plus des socialistes, de nombreux communistes devraient prendre part à cette conférence, dont Marie-George Buffet.
11 h 00 : réunion hebdomadaire du groupe parlementaire socialiste
Depuis les vœux tonitruants du président du groupe socialiste, « ça tangue au PS »,
pour reprendre l'expression d'un membre du Bureau national. Le
court-circuitage du débat a même amené des partisans de la voie
parlementaire et du traité de Lisbonne (comme Manuel Valls et Jack
Lang) a se positionner contre les déclarations de Jean-Marc Ayrault.
Qui plus est, l'intervention de Tony Blair au Conseil national de l'UMP
ce week-end a donné lieu à des rapprochements peu flatteurs pour la
direction du PS : un socialiste qui met tant de ferveur à défendre le
mode d'adoption préconisé par Sarkozy avant de tomber dans les bras du
Président de la République, voilà une image forte !
« Une bonne leçon », juge Paul Quilès, qui semble déjà avoir été prise en compte dans les instances du parti : « dans l'entourage de Jean-Marc Ayrault, on s'inquiète pas mal »,
glisse-t-on au Palais Bourbon. Il se pourrait bien que ce dernier se
trouve bien seul lors de cette réunion où doit justement être
rediscutée la question du vote socialiste sur le traité. La débâcle
serait telle que, selon un membre du Bureau national du PS, la
direction pourrait opérer un virage à 180°, invitant les députés à se
rendre à Versailles pour voter pour ou contre la modification
constitutionnelle ! Un consigne qui pousserait un peu plus loin le
lunatisme ambiant mais qui aurait le mérite de faire rerentrer le PS
dans le jeu parlementaire.
12 h 30 : convocation des députés socialistes par Henri Emmanuelli
A la suite des vœux du président du groupe, le député des Landes est
sorti de la réserve qu'il observait avec Laurent Fabius. Pour
Marie-Noëlle Lienemann, « le réveil de Fabius et d'Emmanuelli a fait bouger du monde ».
Le Comité national pour un référendum ne comptait en effet jusqu'ici
aucun partisans des deux « nonistes » de 2005, restés en attente d'un
positionnement clair. Mais il semblerait que, la trompette ayant
résonnée, les contingents se reforment. L'invitation d'Henri Emmanuelli
a été lancée à tous les députés socialistes, ainsi qu'aux sénateurs,
par courtoisie.
Fin d'après-midi : début des
débats sur le texte pour la modification de la constitution préalable à
l'adoption du traité de Lisbonne.
Le vote aura lieu
mercredi après les questions au gouvernement, si les débats sont
terminés mardi soir, soit dans la nuit de mercredi à jeudi si les
échanges continuent.
Mardi 15 Janvier 2008 - 00:38
Sylvain Lapoix