Anne-Marie Le Pourhiet : « Il suffit de 60 députés pour imposer le référendum! »
Anne-Marie Le Pourhiet : « Il suffit de 60 députés pour imposer le référendum! »
Anne-Marie Le Pourhiet.
Marianne2.fr
: Quelle est la portée de la décision rendue par le Conseil
constitutionnel sur le traité de Lisbonne ce jeudi 20 décembre?
Anne-Marie Le Pourhiet : Quand on met côte à côte les conclusions de décembre 2007 sur le traité de Lisbonne et celles de novembre 2004
sur le traité constitutionnel (TCE), on est bien en peine de voir les
différences ! Il s'agit pratiquement de la même décision, et le texte
publié le 20 décembre fait clairement référence à celui que le Conseil
constitutionnel avait rendu sur le TCE. Dans le 12è point, qui porte
sur les droits fondamentaux, le conseil note même que « hormis les
changements de numérotation » la Charte est la même ! Il y a quelques
modifications, comme sur le droit de la famille, qui connaît de
nouvelles restrictions pour l'intervention des parlements nationaux.
Mais dans l'analyse qui est celle des clauses affectant l'exercice de
la souveraineté, il n'y a rien de neuf. Le Conseil n'a pas vocation à
statuer sur la procédure de validation par voie parlementaire.
La Constitution que révisera le Congrès pour adopter le traité de Lisbonne.
Un
Comité national pour un référendum (CNR) s'est constitué : étant donné
le constat d'identité dressé par le Conseil constitutionnel entre le
traité de Lisbonne et le TCE, les parlementaires qui y ont adhéré
pourraient-ils obtenir l'annulation de la validation par l'Assemblée
nationale?
Selon la Constitution, soixante députés ou
soixante sénateurs peuvent saisir le Conseil constitutionnel. Face à la
loi qui autorise la ratification du traité de Lisbonne, ils pourraient
plaider que l'adoption par voie parlementaire d'un texte qui reprend
l'essentiel d'un traité rejeté par le peuple est contraire au principe
démocratique de la Constitution. Certes, il n'y pas, comme en
Californie, de mention explicite de ce principe. Mais l'Italie était
dans la même situation que la France et sa Cour constitutionnelle a
établi ce principe démocratique comme implicite dans la République. Le
Conseil rejeterait probablement la requête, comme il l'avait fait quand
Charasse s'était opposé à la révision de la Constitution en 2003, mais
pour les partisans du référendum, ce serait un baroud d'honneur.
François Fillon a donné dans
un entretien au Monde un résumé de la réforme Balladur sur les
institutions : qu'en est-il de l'option référendaire dans cette
révision?
Sur l'Europe, Chirac avait profité de la
révision constitutionnelle relative au TCE pour inscrire l'obligation
de consulter le peuple par référendum pour les élargissements. Or, la
révision Balladur va tout simplement réviser celle de Chirac ! Quand
Fillon parle d'élargissement « sous conditions de révision », cela
signifie que, pour toute entrée d'un nouvel Etat-membre dans l'Union
européenne, le Congrès sera convoqué. En conséquence, l'entrée de la
Turquie en Europe sera décidé par les parlementaires.
Vendredi 21 Décembre 2007 - 00:03
Propos recueillis par Sylvain Lapoix