Rama Yade à Colombes: l'UMP copie-colle la méthode Sarkozy

17 décembre 2007

Rama Yade à Colombes: l'UMP copie-colle la méthode Sarkozy

Par Thomas Huet (Etudiant et journaliste) 19H15 16/12/2007

Sarkozy l'a bien fait comprendre: il ne réitérera pas l'erreur de Raffarin. Lors des élections régionales 2004, le gouvernement de ce dernier s'était efforcé de ne pas s'ingérer dans la campagne. Le scrutin municipal de 2008 sera, lui, une affaire d'Etat: comme Rama Yade à Colombes, les ministres sont déployés sur des listes stratégiques.

La secrétaire d'Etat aux Droits de l'homme et aux Affaires étrangères, qui n'était pas candidate aux dernières législatives, viendra se frotter au suffrage universel pour la première fois à Colombes.

Un défi personnel pour la jeune femme, et un renfort bienvenu pour une bataille loin d'être gagnée pour l'UMP. Dans cette ville de la boucle nord des Hauts-de-Seine, le parti entend en effet appliquer la méthode électorale qui a réussi à Sarkozy durant les dernières présidentielles.

La mairie à droite, mais le PS en tête lors des scrutins de 2007

En 2001, la rouge Colombes passe au bleu. L'UMP Nicole Goueta met alors fin à trente-six ans de gestion municipale communiste. Six ans plus tard, il s'agit pour l'UMP de conserver la ville, face au Parti socialiste et son candidat Philippe Sarre, solide localement. En mai, Ségolène Royal avait remporté les voix de 54% des Colombiens. Une confiance pour la gauche renouvelée à l'occasion des legislatives.

L'inauguration de son local de campagne flambant neuf a été, samedi 15 décembre, le prétexte pour l'UMP à une démonstration de force, réunissant ténors du parti, membres du gouvernement, et même la désormais indispensable touche people. (Voir la vidéo.)

Présent samedi, Roger Karoutchi, secretaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement s'enthousiasme: "C'est avec un plateau comme ça qu'on gagne". Tous les ingrédients éprouvés lors de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy étaient donc rassemblés à Colombes.

Militants et cadres de l'UMP ont bien retenu la leçon: les dogmes et symboles se succèdent au rythme des tours de paroles. Après la présentation de son bilan, Nicole Goueta est félicitée par Patrick Devedjian, secrétaire général de l'UMP, et Manuel Aeschlimann, maire d'Asnières, pour cette "rupture" rondement menée avec "l'idéologie Communiste".

Devedjian en profite pour rappeler que " le soutien à Nicolas Sarkozy et le soutien à Nicole Goueta, c'est la même campagne". "Ce qui est fait au niveau gouvernemental, c'est la même chose que les actions que nous entreprenons dans les collectivités territoriales" ajoute-t-il.

Le péril rouge, de la Colombie à Colombes...

Comme Nicolas Sarkozy l'a fait avec Guy Môquet, Arnold Bauer, premier adjoint au maire de Colombes, dévoile le symbole choc et inattendu du show offert aux militants. Il invoque Ingrid Bétancourt, encore aux mains des FARC, pour malmener le Parti communiste local. De Colombes à la Colombie, il n'y a qu'un pas:

"Colombes, ce n'est pas la Colombie, mais ne vous méprenez pas. Le PC a su jouer de l'angoisse et de la terreur pour faire réélire la gauche aux dernières cantonales."

Pas de chances pour Madame Goueta: ni Enrico Macias, ni Doc Gyneco n'habitent Colombes. Alors on fait avec les moyens du bord: c'est Alexandre Debanne qui prend du service. L'animateur télé, habitant de Colombes depuis trois ans, vante au public "cette rencontre sur le plan humain" avec la maire actuelle.

La maire se prend les pieds dans le tapis de l'ascenseur

La vraie star c'est toutefois Rama Yade. Si elle s'est montrée très à l'aise dans ses échanges avec les Colombiens, quelques petits réglages restent à faire avec sa nouvelle équipe.

Ainsi, au respectueux "Madame Goueta" qu'elle adresse à la tête de liste UMP de Colombes, celle-ci la reprend: "appelez-moi Nicole". Il faut dire qu'elles ne se connaissent pas depuis très longtemps: "Moi je la connaissais, puisqu'elle est maire de Colombes, mais on s'est personnellement rencontrées cette année", explique Rama Yade.

Nicole Goueta, en tout cas, compte bien sur le rayonnement de l'ancienne Colombienne pour récolter des voix:

"Elle représente [le fait] que l'ascenseur social existe, et que quand on veut sortir des difficultés, des cités, on a la possibilité de le faire."

L'ascenseur social? Ce dernier n'a pourtant pas eu besoin de descendre bien bas pour Rama Yade, issue d'un milieu aisé du Sénégal, née d'une mère professeur et d'un père secrétaire particulier du président Senghor...

Une candidate peu au fait des affaires judiciaires de sa tête de liste

Pour celle qui s'est illustrée par sa réaction fracassante au début de la visite de Khadafi en France, des procédures judiciaires locales risquent aussi de rentrer en contradiction avec sa fonction au gouvernement.

En février, la Cour de Cassation rendait un arrêt à l'encontre de Nicole Goueta, maire de Colombes, pour ne pas avoir voulu célébrer un mariage entre un Français et une Algérienne. Faire campagne avec un maire qui a entravé le droit d'un homme et d'une femme de s'unir librement: un grand écart à venir pour celle qui est chargée des droits de l'homme au gouvernement.

Une question posée sur le sujet l'énerve visiblement. Pour ce genre d'affaires, Rama Yade sait faire la part des choses entre le local et l'international. Et de toute façon, elle n'était pas au courant... (Voir la vidéo.)