Yvan Colonna condamné à la perpétuité
vendredi 14 décembre 2007, mis à jour à 08:35
Corse
Eric Mettout
Sous les cris d'une salle hostile à "l'Etat français assassin", le "berger de Cargèse" a été reconnu coupable du meurtre du préfet Erignac par la cour d'assises spéciale de Paris, à l'issue d'une journée où, avec ses avocats, il n'a cessé de proclamer son innocence. Condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, il va faire appel.
andis
que son père se prenait la tête dans les mains et que la salle, acquise
à l'accusé, criait "Staline, mascarade" ou "Etat français assassin",
Yvan Colonna a tendu, souriant, les deux mains aux menottes des
gendarmes avant de lever ses bras enchaînés et d'adresser un clin
d'oeil à l'un de ses avocats, Me Gilles Simeoni: près de 10 ans après
les faits, il a été, sans surprise, condamné ce jeudi soir à la
réclusion criminelle à perpétuité par les sept magistrats
professionnels de la cour d'assises spécialement composée de Paris,
pour l'assassinat du préfet Erignac, le 6 février 1998, à Ajaccio, et
pour l'attaque de la gendarmerie de Pietrocella, cinq mois plus tôt.
Son
frère Stéphane et le reste de sa famille, présents pendant l'énoncé du
verdict, ont quitté le palais de justice de Paris quelques minutes
après, sans faire de déclaration. Me Philippe Dehapiot, un autre de ses
avocats, a en revanche estimé que son client avait été "condamné sans
preuve au bénéfice du doute. C'est un renversement complet de nos
grands principes: normalement, le doute profite à l'accusé"
"Etat français assassin"
L'accusé
avait, en fin de matinée, réaffirmé "avec force" son innocence,
échangeant des sourires avec sa famille, présente au premier rang,
avant de quitter le box, entouré de deux gendarmes. En début de
journée, Me Gilles Simeoni, avait plaidé dans le même sens, dénonçant
une instruction "à charge" et suggérant que d'autres coupables se
trouvent toujours en liberte, une thèse soutenue tout au long du procès
par la défense du berger de Cargèse.
Pour son confrère, Me
Antoine Sollacaro, qui a demandé pour son client le "bénéfice du
doute", tout le dossier n'est qu'un "contre-feu", destiné à "sauver le
soldat Bonnet", le successeur de la victime, empêtré par "l'affaire des
paillotes".
A l'inverse l'accusation s'est efforcée, pendant le
mois qu'a duré son procès, de démontrer qu'Yvan Colonna était bien la
main armée du commando dirigé par Pierre Alessandri et Alain Ferrandi,
déjà condamnés à la perpétuité et qui, au lendemain de leur
arrestation, avaient clairement désigné leur complice.
Pendant
l'audience, les deux hommes se sont certes rétractés, mais du bout des
lèvres, usant pour ce faire de formules ambigües et provoquant la
colère froide de l'accusé. La partie civile s'est engouffrée dans ce
"service minimum", comme dans les nombreuses contradictions qui ont
émaillé les témoignages à décharge, pour affirmer sa conviction qu'Yvan
Colonna est le tueur d'Ajaccio.
L'un des deux avocats généraux,
Christophe Tessier, a certes reconnu des erreurs dans l'enquête
policière et l'instruction, mais selon lui, évoquer ces irrégularités
pour affirmer son innocence, revient à monter un "écran de fumée par
rapport aux éléments de culpabilité."
Me Sollacaro a d'ores et déjà indiqué qu'Yvan Colonna allait faire appel du verdict de la cour d'assises.