Alain Bauer: «Une mission ? Oui. Un ministère ? Sans façon»

7 décembre 2007

Alain Bauer: «Une mission ? Oui. Un ministère ? Sans façon»

Alain Bauer place Beauvau ? Il se dit que l'ancien Grand Maître du Grand Orient de France pourrait bien occuper un poste de secrétaire d'Etat à la sécurité publique aux côtés de Rachida Dati au ministère de l'Intérieur.

Alain Bauer est un expert du crime pantagruélique, impassible à toute critique assénant dans les débats télévisés ses vérités avec une assurance désarmante tant il paraît maîtriser ses dossiers sur le bout des doigts. Sorte d'Alexandre Adler de la délinquance –même la ressemblance physique est frappante-, il est comme son confrère une sorte d'omniscient multimédiatique, super consultant multicartes, passé comme l'autre de gauche à droite, présent dans de nombreuses officines et autre cercles de pouvoir, notamment la franc-maçonnerie dont il fut Grand Maitre. D'ailleurs, de même qu'Adler n'envisage la lecture de l'histoire « que du côté du manche » comme le notait justement Philippe Thureau d'Angin le directeur de Courrier International, dans un portrait de Libération, Alain Bauer n'envisage la délinquance et la criminalité qu'en termes de sûreté urbaine et d'audits techniques qualifiés avec force poésie de « qualitatifs » et « quantitatifs ». Des statistiques, études et autre expertises présentées avec un tel talent oratoire que, si elles ne disent souvent rien sur la désintégration profonde d'un modèle de société, sont toujours les bienvenues en illustration d'un énième plateau télé vite monté, entre deux feux de voitures, sur le « malaise des banlieues ».
Une verve qui lui permettrait d'ailleurs sans doute de présenter les thèses opposées aux siennes avec le même aplomb.

AB Associates : sa petite entreprise
Alain Bauer est l'expert rassurant, celui qui confirmera toujours que la situation est sous contrôle, le malaise facile à décrypter, que le précédent historique existe déjà et que les solutions sont connues –pas comme l'anxiogène Baudrillard qui osait affirmer en 2005, que ces jeunes, « immigrés dans leur propre pays » préféraient encore peut-être brûler ce que cette société pouvait leur offrir de mieux : des voitures. « A chacun ses plaisirs »-.
Et quand Alain Bauer a fait l'état des lieux, la rénovation reste à entamer. Pour cela rien de plus simple, Alain Bauer a tout prévu, il suffit de contacter sa société de conseil, la bien nommée AB Associates. Un nom qui résonne comme celui d'une agence immobilière américaine mais dont les activités sont beaucoup plus périlleuses (audit de sûreté urbaine, diagnostic local de sécurité, veille stratégique, assistance à la gestion de crise etc.).
Personnellement, Alain Bauer fait également du conseil auprès de personnalités politiques. Ancien rocardien, Bauer a rejoint le camp Sarkozy lors de la campagne présidentielle qui l'avait nommé à la tête du conseil d'orientation de l'Observatoire National de la Délinquance en 2003. Date depuis laquelle, il tient à préciser qu'il ne travaille plus pour des collectivités territoriales.

Dati-Bauer à l'Intérieur ?
S'il restait jusque-là plutôt dans l'ombre, il pourrait bien rapidement sortir de sa tanière pour exercer ses talents à ciel ouvert, pour le compte d'une officine sarkozyste. Ainsi, exaspéré par les défaillances de Michèle Alliot-Marie, lors des émeutes de Villiers Le Bel, Nicolas Sarkozy, selon certaines sources popularisées par France Inter et Bakchich souhaiterait promouvoir sa « chouchoute », Rachida Dati, à l'Intérieur et lui adjoindre Alain Bauer au poste de secrétaire d'Etat à la Sécurité publique.
Alain Bauer dément ces rumeurs : « Elles sont, en général, le fait de gens qui ne veulent pas vous voir occuper ces postes » explique-t-il en pouffant de rire, « aucune proposition ne m'a été faite, mais le président de la République a mon numéro de téléphone. Je serais d'ailleurs moins intéressé par un poste que par le contenu éventuel d'une mission ».
Dati-Bauer : un duo improbable sur le papier mais un casting presque parfait –l'essentiel pour Sarkozy- : la douceur et la fermeté, le sourire et les crocs, la carotte et le bâton.
Reste à savoir comment les rôles seraient distribués. Pas si évident…