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Mon Mulhouse2
3 décembre 2007

Besson, Bockel, Cavada… traîtres ou éclaireurs ?

marianne2

Besson, Bockel, Cavada… traîtres ou éclaireurs ?

Depuis six mois, l'« ouverture sarkozyste » engrange, chaque semaine ou presque, de nouveaux ralliements. Ganelon revient-il à la mode ou ces conversions ont-elles un fond idéologico-politique ?



Les Progressistes, la Gauche moderne, le Nouveau Centre, le Parti radical… Le label « à la gauche de Sarko » suscite bien des OPA. Objectif lointain : devenir une sorte d'UDF alliée au parti du Président, sachant que ce dernier est tout à fait disposé à aider ceux qui seront les plus crédibles dans la finalisation de ce casting politique. A plus court terme, exister à la cour et, au besoin, trouver une combine pour financer son groupuscule, comme l'imaginatif Nouveau Centre d'André Santini y est parvenu en passant une robe tahitienne dans un coin de l'Assemblée…

On a bien du mal à distinguer, sur le plan des idées, ce qui différentie ces particules de poussière de partis politiques. Pour donner une idée de l'ambiance, Jean-Marie Bockel, l'heureux papa de « Gauche moderne », a le plaisir de faire savoir – au Fig' Mag, il faut ce qu'il faut – que son parti, nouveau terme pour désigner dix énergumènes se réunissant dans un grand hôtel avec les sous de l'Elysée, compte dans ses rangs un ex-PS éternel candidat malheureux à la Mairie de Marseille, Philippe Sanmarco, un premier secrétaire du PS toulois (et non toulangeau ou touliste) David Melloni, l'élégant Georges-Marc Benamou, que son ego démesuré a sans doute empêché de rejoindre les radicaux de Borloo, ou même l'épouse de Max Gallo. Il ne manquait qu'un cousin du Président, mais à ce compte-là, le cousin du Président est beaucoup trop cher pour la bourse du maire de Mulhouse…
En cet automne donc, les traîtres poussent dru dans le « champ politique », et ce n'est pas fini puisque Saint-Germain bruisse à nouveau du ralliement de Jack Lang. Ces Ganelon de la politique provoquent un irrésistible désir de se foutre de leur fiole tant leurs gesticulations fleurent, pour de vrai, le – petit – cadavre pas du tout à la renverse. Mais on ne le doit pas : le destin des Bockel, Besson et autres Cavada ou Morin est plein d'enseignements sur la, ou les, alternatives possibles à Sarkozy. Car, à écouter attentivement les opposants socialistes ou même Modem à la majorité présidentielle, on se dit que le choix des ralliés au sarkozysme ne trahit pas seulement un incontestable arrivisme..

Une opposition de forme
Le Traité simplifié ? Bayrou comme Royal ont claironné pendant toute la campagne leur opposition à tout nouveau traité qui ne serait point ratifié par le peuple. Les deux pensent, font-ils savoir, toujours la même chose, mais ne jugent pas utile de s'opposer à l'adoption parlementaire d'un traité que le peuple a refusé, sans doute au nom d'une forme d'honnêteté intellectuelle : ils n'auraient pas fait différemment que le Président.
La fin des régimes spéciaux ? Le PS comme le Modem sont d'accord, et cantonnés à des réserves de forme, l'antre de la mauvaise foi en politique.
La réforme des universités ? Le projet Sarkozy a été érodé par tous les bouts. Il n'en reste que la possibilité offerte aux présidents d'université de se représenter pour un second mandat. Au nom de cette incroyable audace – qui maintient intacte la mission confiée à nos universités de faire garderie d'adolescents attardés –, l'Etat distribue des milliards pour rénover et repeindre les bâtiments, ce qui, il est vrai, n'est pas un luxe.
Le pouvoir d'achat ? Le gouvernement signe des chèques pour relancer la croissance, en partie avec avec l'argent de l'Etat (l'augmentation du tarif des heures sup' dans la fonction publique, le rachat de RTT des fonctionnaires), en partie avec celui des autres (les augmentations négociées contre le renoncement aux 35 heures, l'abandon des cautions lors de la location de logements, le changement d'indice immobilier). Ici, les critiques des socialistes et du Modem portent surtout sur le manque de rigueur budgétaire du sarkozysme. Car il faut, hélas, se rendre à l'évidence : les deux partis sont encore plus orthodoxes que les gouvernants sur le plan de la politique économique.
Les médias ? Nicolas Sarkozy a encouragé l‘OPA de LVMH sur les Echos, refusé de recevoir le Forum des sociétés de journalistes, laissé en l'état un audiovisuel public pourtant en piètre forme. Mais les autres auraient-ils fait autre chose ?

Ces aimables palinodies ne sont pas seulement plaisantes à décrypter. Elles illustrent une donnée importante de la période : en temps de néolibéralisme, il ne peut y avoir d'alternance « réformiste ». La mondialisation ne laisse plus aucun espace vital à la social-démocratie, plus de grain à moudre aux syndicats : nous sommes déjà à l'os de l'Etat-providence.
Trouver d'autres marges de manœuvre impose de construire de nouvelles stratégies pour s'opposer à la logique du libre-échange intégral, si possible au niveau européen : protéger le made in Europe pour arrêter les délocalisations et la désertification industrielle, réguler les immigrations pour arrêter une libre concurrence absolue sur le marché du travail qui détruit le droit social, mettre en place et stimuler les investissements européens en matière de défense et de nouvelles technologies, défendre l'exception culturelle européenne face aux menaces sur la propriété intellectuelle engendrées par le développement du Web. Il faudrait donc convaincre nos partenaires, et d'abord l'Allemagne, sur toutes les dimensions d'un revirement complet de la politique de l'Union européenne. L'inquiétude nouvelle des milieux d'affaires germaniques sur l'euro fort montre que ce n'est pas impossible.
Mais un tel socle programmatique a, reconnaissons-le, peu de chances de sortir des conclaves sur la rénovation du PS ou des proclamations du Modem. Finalement, Besson, Cavada, Bockel et les autres sont-ils des traîtres ou des éclaireurs ? Les deux, mon Général !


Lundi 03 Décembre 2007 - 00:13

Philippe Cohen

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