PS Blues (4) : Jean-Louis Bianco : « Le blues ne durera pas »
PS Blues (4) : Jean-Louis Bianco : « Le blues ne durera pas »
Pourquoi le PS est-il « inaudible » ?
Jean-Louis Bianco : Ces
critiques sont entretenues de l'extérieur et de l'intérieur pour servir
une stratégie politico-médiatique claire de Nicolas Sarkozy : faire
croire qu'il n'y a rien entre lui et Besancenot. On est en présence
d'un pouvoir très arrogant. Il n'y a qu'à voir comment il traite nos
propositions à l'Assemblée. Les députés PS proposent beaucoup de choses
– sur la baisse de la TVA sur les produits de première nécéssité, sur
le pouvoir d'achat en général… Nous sommes toujours traités par le
mépris.
Vous parlez de « stratégie
politico-médiatique ». Pensez-vous que les médias sont responsables du
« trou d'air » que traverse le PS ?
Ce n'est pas un
trou d'air, je suis d'accord avec l'analyse d'Henry Weber : nous avons
perdu une bataille électorale, nous sommes simplement en train
d'accuser le coup. Mais concernant les médias, et plus précisément la
télévision, leur façon de traiter les socialistes est frappante. A
partir du moment où le CSA refuse de décompter le temps de parole d'un
Président qui est aussi Premier ministre, ministre de l'Intérieur, de
l'Education nationale, etc., il ne nous reste environ que 10% du temps
de parole politique. Et comme nous en utilisons la moitié pour étaler
nos querelles internes, ça ne fait plus que 5%... Alors forcément, nous
sommes « inaudibles » !
Justement, vous évoquez les « querelles internes ». Est-ce que ce n'est pas plutôt cela qui trouble vos sympathisants ?
Je ne crois pas. Que les socialistes ne soient pas d'accord entre eux
sur un certain nombre de sujets prouve la vitalité de l'expression dans
notre parti. Evidemment, les gens préfèrent souvent voir une seule
tête. Mais les réflexions qui se mènent actuellement au sein du PS sur
la nation et sur la mondialisation me paraissent très utiles. Même si
ça n'intéresse pas forcément les Français, c'est un travail essentiel
pour nous. On ne peut pas nier que nous ayons un aggiornamento à faire
!
Ségolène Royal s'est tenue,
jusqu'à présent, à distance d'un parti qui ne l'avait peut-être pas
assez soutenue pendant la campagne…
Dire que le parti
n'était pas derrière elle est exagéré. La base du PS, les premiers
fédéraux et même les secrétaires nationaux ont vraiment joué le jeu, y
compris des gens qui ne l'aimaient pas ou qui lui préféraient Fabius ou
DSK. Aujourd'hui, tout en gardant sa liberté, Ségolène Royal veut jouer
collectif. Si on lui propose des tâches dans la rénovation du PS, elle
ne les refusera pas. Une fois passée le moment de la parution de son
ouvrage Ma Plus belle histoire, C'EST VOUS (Grasset), elle va également limiter ses interventions dans les médias. La campagne est terminée.
Comment comprendre alors « Désirs d'avenir » : comme un nouveau courant, un club, un parti… ?
Non, Désirs d'avenir n'est surtout pas un parti bis, ni rien de tout
cela. C'est une structure de réflexion et un lieu de réunion. Pendant
la campagne, elle a pu décevoir quelques-uns de ses membres, des gens
qui n'ont pas compris qu'une campagne présidentielle est une guerre
éclair, qu'on n'a pas toujours le temps de prendre connaissance du
travail de chacun, de féliciter les uns et les autres parce qu'on est
dans l'urgence… Mais depuis la rentrée, Désirs d'avenir est devenu un
lieu où, à l'inverse, on prend le temps de réfléchir sur tous les
sujets, et pas seulement entre gens du PS puisqu'un tiers des membres
ne sont pas des militants socialistes.
Qu'est-ce qui est le plus important pour redresser la barre : la refonte idéologique ou se doter d'un leader ?
D'ici un an, il y aura le Congrès. Est-ce que le premier secrétaire que
se choisira le parti socialiste sera aussi son candidat pour 2012 ? Je
n'ai pas de religion arrêtée sur la question. Est-ce qu'il s'appellera
Bertrand Delanoë, Ségolène Royal, est-ce que François Hollande
souhaite, à l'issue de son mandat, être candidat à la présidentielle…
Toutes ces questions sont secondaires. Ce qui est certain, c'est que la
période difficile que nous connaissons ne durera pas, d'une part parce
que le travail de rénovation idéologique est en train de se faire,
d'autre part parce qu'on voit déjà que la popularité de Nicolas Sarkozy
s'essouffle.
Pour être plus efficace face à
Nicolas Sarkozy, est-ce que l'opposition, et pas seulement la gauche
plurielle mais aussi, à votre gauche, la LCR ou à votre droite, le
Modem, ne devraient pas resserrer leurs liens ?
Besancenot, c'est « faut qu'on, y a qu'à ». Il tient un discours facile
: refuser les licenciements, augmenter tous les salaires, etc. C'est
sympathique, mais ce n'est pas une position responsable. Concernant la
gauche plurielle, il faut, bien sûr, travailler ensemble, mais pour
cela il faut que chacun sache qui il est et précise son projet. Cela
vaut pour les Verts, le PC, LO ou même le PS. Enfin, concernant le
Modem, je partage l'analyse de François Rebsamen : il ne faut pas
s'interdire d'alliances électorales s'il s'avère que nous sommes
d'accords sur certains points. Il faudra avoir des discussions et,
avant cela, il faut surtout que le Modem sache lui aussi qui il est.
Lundi 03 Décembre 2007 - 00:08
Propos recueillis par Anna Borrel